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A demi mondes
5 décembre 2010

Rencontres, Interactions, programmation

Lieu: Chez moi, Forest Grove, Oregon
Humeur: Téméraire, en paix
Playlist: Nova Tunes 0.1 à 2.2 (en mode aléatoire)

Vous autres,

Nous nous trouvons tous imbriqués dans le flot quotidien d'échanges avec nos homologues humains.
Nous vivons tous, agissons, et interagissons en fonction des pressions externes, du contexte, mais également d'un réseau interne d'émotions, d'impulsions ou d'idées/idéaux construits ou développés au fil de nos ans et de nos expériences.
Et pourtant, lorsque l'interaction sociale/personnelle dans laquelle nous nous trouvons se fait trop intense, monte en ferveur et baisse en contenu, nos choix, sur le moment, ne semblent jamais être les bons.

J'ai besoin de réfléchir sur ce qu'est l'affront.

Est-il nécessaire à un moment donné ou un autre d'affronter, le plus clairement, humainement et ouvertement possible cet autre qui nous tracasse, nous fait souffrir, ou dont le comportement est en désaccord avec ce que l'on est et transgresse ce que l'on croit être notre droit ?

Ou, doit-on en tant qu' "adulte", faire avec et ne jamais affronter quoique ce soit, sous prétexte qu'affronter c'est déjà envahir le territoire de l'autre ... et là j'aimerai bien que l'on m'explique ce qu' "être adulte" signifie lorsqu'on a fait le choix d'être l'une des parties d'une relation humaine (que l'on qualifie cette dernière d'amitié, de copinage, de relation amoureuse ... en somme toute relation, plus ou moins imposée par un contexte social, à laquelle on a choisi de prendre part.)

Peut-être alors, lorsqu'on en vient à affronter une personne, le dialogue se situera nécessairement sous la tonnelle du ressentiment, de la discorde, des nerfs à vif, et dès lors il est la première étape de la lutte.

Mais est-il possible de ne pas lutter? Jamais?

Je ne pense pas être capable de m'abstenir. Il est nécessairement un moment où j'en viendrai aux mots. Simplement parce que je ne considère pas ceux avec qui j'interagis comme les ombres de mon monde.
Il m'est impossible de ne pas m'investir, sûrement mon plus grand défaut, dans la vie de ceux qui m'entourent, et c'est probablement la plus grande preuve de mon égoïsme, de mon égocentrisme.

Vous arrive-t-il de penser à ce qu'est le monde, pourquoi et comment ce monde auquel vous appartenez a du sens, pourquoi vous le comprenez suffisamment pour y vivre et à chaque seconde y laisser votre trace et vos souvenirs? Parce que ce monde est le vôtre. C'est celui dans lequel Vous évoluez, celui que Vous créez.
Il y a bien entendu une infinité de facteurs extérieurs sur lesquels vous n'avez aucun contrôle direct, et pourtant cela ne vous empêche pas de vivre. Vous, être conscient, être créateur d'évènements, être pensant, être de fantaisie qui inventez des mondes et expliquez ceux que vous ne comprenez ni ne maîtrisez, êtes souverain en votre domaine.

Alors, deux individus conscients qui se rencontrent et échangent c'est toujours une guerre des mondes, une lutte ... l'osmose et la compréhension ne sont possibles qu'au-delà de la conscience, au-delà des mots.

Affronter, se croiser de front à front, lutter et blesser, malheureusement, quand nos armes sont des mots.

Alors quoi? Ne plus s'investir? Contrefaire ses rencontres avec l'autre? Se morfondre et s'inonder, avec les ans, de rancœurs et de mauvais sang? Ou tenter d'annihiler sa conscience, sa présence au quotidien à tel point qu'on en deviendrait intouchable, inatteignable, inaffrontable

Cette idée est plaisante, mais probablement idéaliste. Comment la mettre en oeuvre dès lors? N'est-ce pas cruel quelque part de laisser les autres se dépatouiller dans leurs misérables petites luttes et mal-être quotidiens ? Et n'est-il pas dangereux d'ignorer ses mouvements de coeur jusqu'à en oublier son humanité?

L'Homme est fait de passions, de grands élans sublimes, de petites mesquineries, de changements brusques et inattendus, de coups de sang, de profonde sincérité, de maladresses, de bon sentiments ... et dépouillé de ses couleurs sanguines et biliaires que reste-t-il de lui?

L'affront comme extériorisation sublimée de notre bouillonnement humain. L'affront comme parade à la guerre, terrible, terrible mot. L'affront, d'égal à égal. Catharsis appliquée.

Vous allez me lancer des mots : dialogue !!! diplomatie !!! conversation !!! échange !!! Tolérance!!! mots que j'entends bien. Mais vous savez tout comme moi que ce sont des mots fourre-tout qui se ternissent à mesure qu'on les emploie.

J'examine l'après affront. L'après-coup.

Les blessures sont sommaires. Cela ne saigne pas beaucoup. Des irritations pour la plupart. On s'est très certainement pris un coup à l'estomac. Le bon gros coup de poing dans le ventre qui nous coupe le souffle, nous empêche de formuler une phrase cohérente et nous laisse plié en deux avec dans la bouche un arrière-goût de bile pendant quelques heures ou quelques jours. Ce geste brutal qui surtout nous fait nous demander comment, o comment! il ou elle a osé nous attaquer si grossièrement, nous infliger une telle bassesse avant même que l'on ait osé songer à faire pareil! On rentre chez soi penaud mais paradoxalement fort calme. On va pleurer, verser quelques gouttes d'orgueil malmené, se lamenter auprès d'un ami complètement partiel qui prendra notre défense et attaquera, à distance et rétroactivement, l'autre affronté. Pourtant, à mesure que l'on entend l'ami partiel déverser la hargne que l'on a pas été capable de brandir lors de la joute grammaticale, on se rend compte de la vacuité de notre argumentaire et l'on prend conscience de nos erreurs tactiques, mais en aucun cas on ne se met à haïr cette personne, même si ses mots nous on égratignés, ou pire blessés.

L'affront était nécessaire, même si à présent qu'il est passé, on en doute, et on s'en veut de nos bassesses à nous.

On sait qu'un affront redinamyse une relation qui autrement aurait pourri et empesté tout le voisinage.

Non?

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